|
La Vie Est Belle |
|
Scène 1 : Salle à manger
Perceval : C’était bien la cérémonie, ce matin.
Arthur : Mh.
Perceval : Comment ça s’appelle déjà ? Le...
Arthur : L'adoubement.
Perceval : Ah ouais voilà ! Le p’tit jeune il était pas bien rassuré quand même avec tout c’monde.
Arthur acquiesce en souriant.
Perceval : Remarquez, j’dis ça ! Moi j’sais pas comment j’aurais réagi...
Arthur : Oh non sans déconner, vous allez pas recommencer ? Vous avez forcément été adoubé, sans ça vous ne pourriez pas être à la Table Ronde !
Perceval (chuchotant) : J’arrête pas de le dire ! Je peux pas être à la Table Ronde.
Arthur : D’toute façon l’autre fois je vous ai re-adoubé ! Au cas où. Vous allez pas me gonfler ?
Perceval : Vous m’avez adoubé vite fait, y’avait personne ! Ça compte pas ça !
Arthur : Mais attendez, je suis qui moi, ici ? Le portier ? Si je vous dis que je vous adoube, je vous adoube ! Qu’il y ait du monde ou pas, ça compte, crétin !
Perceval : Même s’il y a personne ?
Arthur : Mais, évidemment !
Perceval : Du coup, vous pourriez pas le refaire là ?
Arthur l’interroge du regard.
Perceval : Non parce que... j’aime bien.
Scène 2 : Même lieu
Perceval : Il avait drôlement bien appris son poème le p’tit.
Arthur (las) : C’est pas un poème.
Perceval : Ah bon ? C’est quoi ?
Arthur : C’est... pas un poème. C’est un texte de cérémonie, ça fait partie du rituel.
Perceval : Ah ouais mais il l’avait appris par cœur quand même.
Arthur : Ah bah oui, ça oui...
Perceval : Moi j’dis chapeau hein... Heureusement que j’ai jamais été adoubé, j’aurais jamais pu retenir tout ça.
Arthur soupire
Perceval : Et c’est quoi quand il a dit heu ... j’sais pas quoi machin... euh gnagnagna euh... le respect, à la mémoire d'Uther le Dragon ?
Arthur : Uther Pendragon.
Perceval : De... ?
Arthur : Pendragon c’est son nom. C’est pas un dragon.
Perceval: Pendragon ? Mais qui c’est celui-là ?
Arthur (absourdi) : Mon père !
Perceval : Vot’père ?! Mais on l’voit jamais vot’père.
Arthur (acquiesce) : Il est mort.
Perceval : Ah merde... Mais là dans la s’maine ?
Arthur : Non, pas là dans la s’maine, non.
Perceval : Et la cérémonie de ce matin c’était pas pour ça ?
Arthur : J’l’ai jamais connu mon père.
Perceval : Ah bon ? Mais comment vous savez qu’il s’appelle Pendragon alors ?
Arthur (à bout) : Bon qu’est-ce que je fais, moi, là ? Qu’est-ce que je fais, j’me fous en rogne ? J’vous descendre les escaliers à coups de pompes dans l’cul ? Je fais quoi ?
Perceval : Non mais m’engueulez pas ! J’essaye de piger !
Arthur : Mais qu’est-ce que vous essayez de piger ? Pendragon c’est le plus grand Roi de Bretagne.
Perceval : Mais j’croyais que c’était vous le Roi de Bretagne !
Arthur : C’est le personnage le plus célèbre du monde Celte. Venez pas m’dire que vos vieux vous ont jamais parlé de lui ?
Perceval : Mais mes vieux qu’est-ce qu’ils en savent de qui c’est le Roi ? Ça fait quarante ans qu’ils entassent des navets dans une grange ! Si vous pensez qu’ils ont eu le temps de m’apprendre les courbettes...
Arthur : Quelles courbettes ?!
Perceval : Bah les machins de cérémonie là... les Rois, les Reines. J’ai tout compris par moi-même. La main sur l’épée quand vous passez devant nous...
Arthur : Oh pfff, vous l’faites jamais, vous !
Perceval : Bah parce que j’oublie mais je l’sais. Ou quand vous êtes en danger, il vaut mieux mourir pour vous défendre, vous, que pour se défendre soi-même.
Arthur (surpris) : Quoi ?
Perceval : Quoi, quoi ?
Arthur : Qu’est-ce que vous avez dit ?
Perceval : Non mais ça en même temps c’est logique. Priorité à celui qui a la vie qui vaut plus.
Arthur : Qui a la vie qui vaut plus ? Mais qu’est-ce que c’est que ça ?
Perceval : Attendez Sire ! Vous et moi on tombe dans une embuscade, il vaut mieux que ça soit vous qui restiez, plutôt que moi.
Arthur : Mais c’est quelqu’un qui vous l’a dit ça ?
Perceval : Bah j’sais plus... les autres ! Ils disent que si vous êtes en danger, il faut se sacrifier.
Arthur : Eh, non, non, non, non, non ! Jamais vous faites ça ! Vous m’entendez ?
Perceval : Bah si c’est la Loi...
Arthur (autoritaire) : Vous faites jamais ça !! Si on tombe dans une embuscade, vous vous barrez en courant. C’est clair ? (haussant le ton devant le silence de Perceval) C’est clair ?!
Perceval : Ok, ok ! Comme vous voulez.
Arthur regarde Perceval d'air à la fois autoritaire et inquiet.
Scène 3 : Même lieu
Perceval : Mais le p’tit a dit « me ferais tuer pour mon Roi sauver » !
Arthur : Oh d’accord mais ça c’est le rituel ça.
Perceval : Alors il va pas l’faire ?
Arthur : Pas vraiment.
Perceval : Et les autres, ils le font pas non plus ?
Arthur : Les autres... les autres, mais je m’en fous des autres. Vous, je veux pas que vous le fassiez, voilà !
Perceval : Et pourquoi ?
Arthur (à court d’argument) : Parce que... heu... parce que... parce que vous êtes pas adoubé ! Voilà ! Vous avez pas l’droit, hop ! (il siffle)
Perceval : Bah, et l’aut’ fois ? Quand vous m’avez re-adoubé ?
Arthur : Hé oui, mais l’autre fois, y’avait personne, ça compte pas.